Ce mot latin désigne la limitation réglementaire du nombre de candidats à un poste ou une fonction.
Tout le monde a entendu parler du numerus clausus appliqué aux médecins, accusé d’être responsable de la désertification médicale du territoire.
Professions réglementées
Un numerus clausus est appliqué dans certaines professions réglementées, comme le notariat ou la pharmacie d’officine. Un notaire ne peut pas ouvrir une étude où il le veut ni comme il veut, pas plus qu’un pharmacien ne peut le faire. Il existe en effet des quotas par habitant, spécifiques à chacune de ces professions.
Emblème de la pharmacie
Liberté d’installation et déserts médicaux
En revanche, les médecins libéraux ont la liberté totale d’installation, et ils ne se privent pas de l’exercer, puisque la plupart des jeunes médecins s’installent dans les grandes villes, et plutôt au sud qu’au nord de la France.
Ceci aboutit à la création des fameux « déserts médicaux », qui commencent dès que l’on quitte Paris, puisque un département comme la Seine et Marne, pourtant partie intégrante de la région Île de France, est considéré comme un désert médical.
Il est pratiquement impossible de contraindre les jeunes médecins à s’installer, même temporairement, dans ces zones, ne serait-ce qu’en raison du fait que, en général, un médecin s’installe dans l’endroit de son choix pour toute la durée de sa vie professionnelle.
Les pouvoirs publics tentent donc de convaincre les médecins, qu’ils soient généralistes ou spécialistes, de venir s’installer dans les zones dépeuplées grâce à des incitations diverses, notamment fiscales.
Pour les médecins qui choisissent le public, le problème est un peu différent. En effet, un praticien hospitalier ne peut candidater que pour un poste disponible, et le nombre de ceux-ci ne dépend évidemment pas de l’attractivité du lieu. On ne risque donc pas le surnombre de cardiologues publics sur la Côte d’Azur, comme c’est le cas pour leurs confrères du privé. En revanche, il sera très difficile d’attirer les « PH » (Praticiens Hospitaliers) dans un hôpital situé dans un désert médical. Ces hôpitaux ne fonctionnent souvent que grâce aux médecins étrangers.
Désert médical
Numerus clausus appliqué aux étudiants en médecine et démographie médicale
Pour les médecins, la régulation de leur nombre se fait depuis quelques années par le biais d’un concours d’entrée aux études médicales.
Autrefois, tout bachelier pouvait s’inscrire en faculté de Médecine ; la sélection (« l’écrémage ») se faisait en cours d’études, beaucoup d’étudiants renonçant à poursuivre ce type d’études après un an ou deux. L’accès aux spécialités passait par le concours de l’Internat, qui intervenait vers la fin des études médicales, ou par les CES (Certificats d'Etudes Spécialisées)
Mais, depuis 2004, le concours intervient dès le départ, sous forme des « épreuves classantes nationales » (ECN), ce qui permet une régulation beaucoup plus fine, que l’on appelle en l’occurrence le numerus clausus. Si l’on veut former plus de médecins, il suffit, théoriquement, d’augmenter le nombre d’étudiants admis à l’Internat, autrement dit de modifier le numerus clausus.
En revanche, il est plus difficile de réguler le nombre de médecins s’orientant vers telle ou telle spécialité, car on ne peut pas obliger un étudiant à choisir une spécialité ; cependant, un mauvais classement au concours pourra lui barrer l’accès à une spécialité très prisée.
Il faut de dix à quinze ans pour former un médecin. Dans ces conditions, lorsque le besoin se fait sentir d’augmenter le nombre de médecins exerçant une spécialité en sous-effectif, les effets d’une modification du numerus clausus se feront attendre plusieurs années.
Actuellement, les médecins de la génération du « baby boom » ont l’âge de prendre leur retraite, ce qui pose de gros problèmes de démographie médicale, qui est l’expression consacrée. On peut espérer que tout cela a été anticipé par un aménagement progressif du numerus clausus.
Pour finir, un petit rappel sur les mots latins utilisés en français
Numerus clausus est une expression latine. Dans la langue latine, il n’y a pas d’accent ; il convient donc de ne pas en mettre, ni au "e" de numerus, bien qu’il se prononce "é", ni sur le "a" initial dans les expressions "a priori", "a posteriori" ou encore "a contrario". Vous noterez également qu’il est d’usage de mettre les mots étrangers d’un texte écrit dans une typographie différente du reste du texte, notamment en italique, comme ici.
Cela dit, on peut considérer certains de ces mots latins comme faisant partie intégrante du vocabulaire français ; dans ce cas, on n’écrit pas le mot en italique et on met un accent si besoin : "médium" par exemple.
Pour ce qui est du pluriel, c’est un peu plus compliqué : les mots latins ont un pluriel spécifique : "medium" devient "media", "minimum" donne "minima"…
Quand ces mots sont utilisés en français, on peut employer le pluriel latin, comme dans l’expression "des minima sociaux", ou bien considérer le mot latin comme un mot français, et lui appliquer un pluriel de type français : "minimums" ou "forums" par exemple.
On notera en passant la bizarrerie représentée par le mot « média », qui correspond au départ au pluriel du mot latin "medium". On dit donc, en français, "un média" au singulier, et "des médias" au pluriel; mais il est vrai que "médium" a un autre sens que "média" dans notre belle langue.
La règle que nous venons de rappeler s’applique également aux autres langues étrangères, comme l’italien : si l’on considère le mot "scenario" comme un mot italien, on ne met pas d’accent et on l’écrit en italique ; au pluriel, cela donnera "scenarii" ; mais si on le considère comme un mot appartenant de plein droit à la langue française, on écrira "scénario" au singulier, et "scénarios" au pluriel.
Ce petit rappel linguistique me semble justifié par le fait que vous êtes en train de visiter un site de vocabulaire, certes médical, mais de vocabulaire français avant tout.
Article publié le 9 juin 2014