Ces trois termes ont en commun l’acte de dispenser, qui est un équivalent de donner, de distribuer, mais qui peut aussi vouloir dire exempter.
Le dispensaire, dans lequel on dispense des soins aux indigents, n’existe plus guère en tant que tel, mais on dispense toujours des soins et des médicaments, ces derniers dans le cadre de leur dispensation, barbarisme toléré.
Dispensaire
Un dispensaire est un établissement de santé public ou privé à but non lucratif, dans lequel on dispense des soins et des remèdes. Cette dispense est en principe gratuite, car à l’origine réservée aux indigents.
Historiquement, les premiers dispensaires étaient tenus, sous l’Ancien Régime, par des congrégations religieuses féminines comme les Dames Ursulines ou les Sœurs de Saint Vincent de Paul.
Ce terme de dispensaire est devenu quelque peu désuet, bien que des dispensaires existent toujours, mais parfois sous d’autres appellations, comme celle de « centre municipal de santé ». Il s’agit de centres médicaux gérés par les municipalités, qui proposent des consultations médicales et l’ensemble des activités liées à la PMI (Protection maternelle et infantile) et au planning familial.
Théophraste Renaudot, le dispensaire et l’Institut Renaudot
Théophraste Renaudot (1586–1653) est un personnage étonnant par la multiplicité de ses talents. Il est en effet considéré comme le fondateur de la presse française grâce à la création en 1631 de la Gazette, publication hebdomadaire (et l’on peut s’étonner qu’on l’ait qualifiée de journal, ce qui supposerait une parution quotidienne).
On estime également qu’il est le fondateur de la publicité par la création, en 1629, de son journal d’annonces, la Feuille du Bureau d’adresses (1629). Ce bureau d’adresses à l’intention des pauvres était destiné, tout comme notre Pôle Emploi actuel, à colliger les offres et les demandes d’emploi.
Mais sa place dans cet article tient au fait qu’il était également médecin ordinaire du roi Louis XIII, et qu’il fut nommé par celui-ci, en 1612, « commissaire aux pauvres du royaume », après avoir adressé au Conseil de Régence d’Anne d’Autriche un traité intitulé Sur la condition des pauvres.
C’est dans ce cadre qu’il ouvrit un dispensaire dans ses locaux de la rue de la Calandre, à l’enseigne du Grand Coq. Ce dispensaire était gratuit pour les pauvres, mais payant pour les riches, ce qui est la base du principe de solidarité à l’origine de notre Assurance maladie.
C’est en hommage à ce grand humaniste, également honoré par un important prix littéraire annuel, qu’a été créé, en 1981, l’Institut Renaudot, association de santé communautaire qui regroupe des professionnels de centres municipaux de santé (autrement dit des dispensaires), ainsi que des personnes travaillant dans les centres communaux d’action sociale, les CCAS, chargés de l’application locale de la politique de la ville.
Dispense
Le sens usuel et le plus connu du mot dispense est une exemption à la règle commune accordée à quelqu’un pour une raison particulière. A l’époque du Service militaire obligatoire, certains jeunes gens en étaient dispensés (exemptés) par exemple s’ils étaient soutiens de famille.
Dans le domaine médical, cette notion s’applique particulièrement aux activités scolaires et sportives dont certains enfants peuvent être exemptés. Le document qui l’atteste, la dispense, est appelé certificat médical de dispense (de scolarité ou de sport).
Mais on peut aussi dispenser des soins, des conseils ou des remèdes, et, d’ailleurs, la dispense est, théoriquement, la dénomination correcte, quoique désuète, du terme étudié dans le paragraphe suivant, la dispensation, quand il s’agit de distribuer des médicaments. De même que le fait de dépenser est une dépense, l’acte de dispenser est une dispense. Dispensation est donc un barbarisme, mais admis par l’usage, d’autant que dispensation est un terme non ambigu, contrairement à dispense, terme polysémique qui signifie également exemption.
Dispensation
La dispensation est un terme du champ lexical de la pharmacie, qui désigne l’ensemble des étapes qu’effectue un professionnel de santé habilité dans le cadre de la distribution d’un médicament à un individu ou à un groupe de personnes. En France, ainsi que dans de nombreux pays, la dispensation est un acte pharmaceutique, réservé aux seuls pharmaciens. Il existe toutefois quelques rares exceptions au monopole pharmaceutique, autorisant certains professionnels de santé à dispenser une liste très limitée de médicaments.
La responsabilité de la personne qui dispense un médicament est engagée, au civil et au pénal, quand bien même la dispensation est faite sur la foi d’une ordonnance. En effet, le dispensateur ne doit pas délivrer le médicament prescrit s’il estime que celui-ci n’est pas conforme à l’intérêt médical du patient.
La dispensation comporte un certain nombre d’étapes, notamment l’analyse pharmaceutique (vérification de la pertinence de la prescription, respect de la bonne posologie, notamment chez l’enfant ou en cas d’insuffisance rénale, respect des interactions médicamenteuses), la vérification de l’identité de la personne à qui le médicament est délivré, la vérification de la validité de l’ordonnance (attention aux ordonnances volées ou falsifiées). La dispensation concerne également le conseil, l’éducation thérapeutique, l’information sur les possibles effets secondaires, ainsi que l’évaluation de l’efficacité thérapeutique.
Article publié le 17 octobre 2016