En médecine comme dans la vie de tous les jours, une « urgence », c’est un problème qui doit trouver une solution rapide.
Une urgence, c’est une situation médicale urgente. Les Urgences, avec une majuscule et au pluriel, c’est la structure qui accueille les patients qui se présentent en urgence, certains d’ailleurs pour des problèmes qui ne sont pas réellement urgents.
Plusieurs sortes et plusieurs degrés d’urgences
Tout dépend de ce que l’on appelle une réponse rapide, le maximum de rapidité étant représenté par « l’urgence vitale » : si le problème n’est pas réglé dans les minutes qui suivent, le patient risque de décéder. Quelques exemples d’urgences vitales : l’infarctus massif du myocarde ou la rupture traumatique de la rate.
Dans les cas moins dramatiques, on a souvent 24 ou 48 heures, voire plus, pour régler le problème. C’est ainsi qu’une appendicite aiguë ou une occlusion intestinale peuvent n’être opérées que le lendemain de l’admission, du moment qu’il n’y a pas de signes évocateurs de péritonite ou de souffrance intestinale.
Il existe une autre définition possible de l’urgence, du moins en milieu hospitalier, public ou privé : une hospitalisation en « urgence », c’est le contraire d’une hospitalisation programmée, qui fait suite à une consultation médicale. Si vous avez des calculs dans la vésicule, votre médecin traitant vous enverra voir en consultation un chirurgien viscéral, pour programmer une cholécystectomie. Mais si vous faites une cholécystite aiguë, qui est une forme compliquée de la lithiase vésiculaire, vous serez pris(e) en charge en urgence, et votre cholécystectomie sera réalisée après quelques jours d’antibiothérapie, voire à distance, lors d’une hospitalisation programmée.
Qui prend en charge les urgences en France ? Vaste question !
En premier lieu, les médecins généralistes, qui essaient la plupart du temps de trouver un créneau pour recevoir « une urgence » pendant leur consultation. Mais, passée l’heure de fermeture du cabinet médical, cela risque d’être plus compliqué, voire impossible, tout comme pour les spécialistes : vous risquez d’avoir des difficultés certaines pour consulter en urgence un ophtalmologiste ou un dermatologue. Ceci étant dit sans vouloir montrer du doigt une spécialité médicale particulière.
Certains médecins « de ville » se regroupent au sein de « maisons médicales », ce qui permet d’améliorer leur disponibilité pour la prise en charge des urgences. Dans ces maisons médicales, il y a souvent un généraliste de ville disponible jusqu’à 20 heures, voire minuit. Après minuit, on passe à ce qu’il est convenu d’appeler la « nuit profonde ».
Dans certaines grandes villes, il existe des organisations de médecins libéraux qui ne prennent en charge que les urgences, comme SOS Médecins.
En fait, de plus en plus d’urgences sont traitées par les Services d’Urgences, qu’ils soient publics ou privés (ce qui est plus rare). En effet, pour qu’une clinique privée ait un Service d’Urgence, il faut qu’elle ait une certaine taille, afin d’avoir un « débit » d’urgences suffisant pour faire vivre des médecins urgentistes, qui, comme tous les médecins travaillant en clinique privée, sont des libéraux, et donc payés à l’acte. Cela n’empêche pas certaines cliniques d’avoir des Services d’Urgences très performants, en cardiologie par exemple.
Vous aurez noté que l’usage fait mettre une majuscule et un pluriel à urgence à lorsque l’on parle d’un service d’Urgences.
En définitive, la majorité des urgences en France sont prises en charge par des médecins urgentistes dans les hôpitaux publics. Ces derniers ont l’obligation d’accueillir les urgences (contrairement aux cliniques privées dépourvues de Service d’Urgences). Cet impératif rentre dans le cadre de ce que l’on appelle « l’obligation de service public ».
Selon la taille, les moyens techniques disponibles et l’activité du Service d’Urgences, on parle d’UPATOU pour les petites structures (Unité de Proximité d’Accueil, de Traitement et d’Orientation des Urgences), et de SAU (Service d’Accueil des Urgences) pour les structures plus importantes. Dans un SAU, il y a toujours au moins un médecin de garde sur place, contrairement à une UPATOU.
Vous noterez en passant que SAU est une abréviation (on épèle les trois lettres), et UPATOU un acronyme (formé ici de trois syllabes : U Pa Tou).
Certaines urgences complexes sont transférées dans les SAU des CHU, qui disposent de moyens humains et technologiques supérieurs. Par exemple, un AVC gagnera à être pris en charge par un Service d’Urgences Neurologiques, qui dispose d’une IRM 24 heures sur 24, ainsi que de neuroradiologues et de neurochirurgiens de garde. Les chances de guérison avec le moins de séquelles possibles dépendent de la rapidité avec laquelle le patient arrivera dans ce type d’unité très spécialisée.
Pourquoi attend-on aussi longtemps dans un Service d’Urgences ?
Tous les patients qui ont fait l’expérience des « Urgences hospitalières » savent que le délai moyen d’attente est toujours de plusieurs heures. En fait, à l’arrivée d’un patient, un « tri » est effectué, pour prendre en priorité les urgences les plus graves, celles qui sont vraiment urgentes. Pour les autres, il faut attendre qu’un « box » se libère pour que le patient soit examiné par un urgentiste. Ce dernier va établir un plan d’examens complémentaires afin d’étayer ses hypothèses cliniques. Si la réalisation d’un bilan sanguin ne prend pas vraiment longtemps, cela peut être beaucoup plus long pour obtenir une échographie ou un scanner ; tout dépend, dans ce cas précis, de la disponibilité du radiologue de garde. Si, au terme de ce bilan, l’avis d’un spécialiste est souhaité, force est d’attendre que celui-ci soit libre : si on attend un chirurgien en train d’opérer, on sait qu’il ne viendra pas avant d’avoir fini son intervention. Enfin, si une hospitalisation est jugée nécessaire, il faudra se mettre en quête d’un lit disponible dans l’établissement, voire dans un autre hôpital, en cas, fréquent, de manque de lits.
Bref, l’urgence, c’est souvent le parcours du combattant, pour le malade comme pour l’urgentiste et le personnel soignant, fréquemment en butte à la mauvaise humeur des patients qui attendent. Reste à espérer que ces derniers, ou plutôt leurs accompagnants, ne deviennent pas grossiers, ou même violents à force d’impatience : cela se voit de plus en plus souvent.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Sûrement parce que, faute d’autres solutions fiables, un nombre de plus en plus grand de personnes se dirigent vers les Services d’Urgences au moindre « bobo ». Si les Services d’Urgences ne prenaient en charge que de « vraies » urgences, il y aurait probablement beaucoup moins de problème. Mais les Urgences sont encombrées d’urgences simplement « ressenties », c’est-à-dire de patients plus anxieux que véritablement malades, quand il ne s’agit pas tout simplement de gens pressés. Tout médecin urgentiste pourra vous raconter des tas d’histoires du genre de celle-ci : un patient victime d’une entorse de la cheville 8 jours plus tôt passe au petit matin aux Urgences de l’hôpital le plus proche en rentrant de son travail de nuit parce qu’il a encore un peu mal et va se trouver à court d’antalgiques.
Cette surconsommation de « passages aux Urgences » est responsable d’un taux d’hospitalisation plus élevé que chez nos voisins, ce qui explique en partie pourquoi notre système de santé est aussi coûteux. Notre médecine est excellente, tout le monde chez nous s’en gargarise, mais elle est très mal organisée, et donc une des plus coûteuses qui soit en Europe. La principale qualité du système de santé français, ce n’est certes pas sa performance globale, mais son accessibilité pour tous, sans distinction de statut social.
Quelle est la différence entre une « garde » et une « astreinte » ?
En médecine « de ville », on ne fait pas cette différence : on parle du « médecin de garde », de la « pharmacie de garde », et tout le monde comprend de quoi il s’agit.
Dans les hôpitaux, c’est un peu plus subtil : les médecins parlent de garde, alors que l’administration raisonne en garde ou en astreinte. Lorsque le professionnel concerné reste sur place pendant son astreinte, et qu’il peut être appelé à travailler 24 heures d’affilée, il s’agit d’une garde. C’est le cas des urgentistes, bien évidemment, mais également des internes, quelle soit leur spécialité, ou encore de certains spécialistes comme les anesthésistes, les réanimateurs, les chirurgiens, les accoucheurs ou les pédiatres, dans les grandes structures comme les CHU qui ont une activité importante en urgence. Ces professionnels dorment, quand ils en ont le loisir, sur place, et doivent respecter, le lendemain, un « repos de sécurité », la sécurité en question étant essentiellement celle des patients, qui comptent bien être pris en charge par des médecins non épuisés par le travail de la garde. Malheureusement, le manque de personnel médical ne rend pas ce repos de sécurité toujours possible, et tous les internes en savent quelque chose.
Quand le professionnel n’est pas tenu d’être présent en permanence dans la structure, l’astreinte est dite de « sécurité » ou « opérationnelle ». Dans ce dernier cas, le médecin doit pouvoir intervenir rapidement, comme les obstétriciens susceptibles de réaliser des césariennes vraiment urgentes à toute heure du jour ou de la nuit. Dans ce cas d’astreinte opérationnelle le praticien doit loger à proximité de l’établissement, de manière à être sur place en un quart d’heure environ.
Le médecin d’astreinte doit assurer la « permanence et la continuité des soins », qui est la formulation officielle de l’astreinte et de la garde.
Cela dit, que les médecins soient « de garde » ou « d’astreinte », ils établissent tous les mois ce qu’il est convenu d’appeler un « tableau de garde », ou une « liste de garde ».
Qui appeler en cas d’urgence ?
Pour un problème a priori simple, votre médecin traitant en priorité pendant les heures d’ouverture de son cabinet, ou le généraliste de garde en dehors de ces horaires. Le nom de ce médecin de garde pourra vous être communiqué, en cas de besoin, par le commissariat de police.
Sinon, il existe un numéro d’appel unique pour les urgences médicales : le 15. En composant ce numéro, que tout le monde connaît, vous tomberez sur un « médecin régulateur », qui vous orientera au mieux en fonction de vos explications : plus elles seront claires et concises, plus sa régulation sera pertinente et efficiente.
Il existe également des numéros d’urgence régionaux, qui fonctionnent sur le même principe. En Midi-Pyrénées, il suffit de composer le 3966.
Bon courage pour vos futures urgences !
Article publié le 5 juin 2018