Algie et douleur sont strictement synonymes, mais le premier est nettement moins employé que le second.
Algie (du grec algos, douleur) et douleur ont exactement le même sens.
Cependant, le substantif algie est beaucoup moins souvent employé que le mot douleur, beaucoup plus répandu.
En revanche, on parle habituellement d’un antalgique pour désigner un médicament qui soulage la douleur, alors que antidouleur n’est pas très utilisé, du moins par le corps médical.
Comme souvent dans la langue française, chacun des deux synonymes a son emploi propre, qui ne répond à aucune logique : on parle par exemple de douleurs abdominales et non pas d’algies abdominales ; cela dit, les patients ne s’embarrassent pas de telles subtilités, et diront tout simplement au médecin qui va les examiner : « Docteur, j’ai mal au ventre ».
A l’inverse, on dira plus volontiers névralgie (algie dans le territoire d’un nerf) que douleur nerveuse ; de même, on ne dit pas douleur dans la région pubienne, mais pubalgie. Vous noterez que, dans ces deux exemples (névralgie et pubalgie), algie est utilisé comme un suffixe.
On pourrait multiplier les exemples à l’infini. D’une manière générale, algie sonne plus savant que douleur.
Quelques synonymes de douleur
Il existe d’autres termes pour exprimer la douleur, comme par exemple mastodynie pour désigner la tension douloureuse des seins, ou dysménorrhée pour les règles douloureuses. Pour désigner le fait d’avoir « mal à la tête », on parle plus volontiers de céphalée que de céphalalgie (la migraine est une forme particulière de céphalée, strictement unilatérale).
Certaines douleurs viscérales particulièrement violentes sont appelées coliques, comme la colique hépatique (la crise de foie), la colique néphrétique, ou encore la colique de plomb dans le saturnisme (intoxication au plomb). La colique hépatique est mal nommée, car ce n'est pas le foie qui est en cause, mais la vésicule. Dans le langage courant, la colique (la « courante ») désigne plutôt une diarrhée aiguë.
Algologie et algologues
Les spécialistes de la douleur sont des algologues, et ils pratiquent une discipline difficile appelée algologie. En revanche, pour les structures qui pratiquent l’algologie, on parlera plus volontiers de centre de la douleur, ou de consultation pluridisciplinaire de la douleur.
Le fait que se soit développée une discipline qui s’occupe exclusivement de la prise en charge de la douleur tend à prouver que celle-ci est devenue une véritable priorité du corps médical, du moins dans les intentions. Fini, du moins en principe, l’injonction biblique faite aux femmes d’avoir à « accoucher dans la douleur ».
Douleur physique et douleur psychique (psychogène)
On décrit deux catégories de douleurs : la douleur physique et la douleur psychique, que l’on appelle plus volontiers psychogène. La prise en charge de ces deux types de douleurs est évidemment très différente : antalgiques dans un cas, psychotropes ou psychothérapie dans l’autre.
Pour ce qui concerne la douleur physique, il en existe deux types : la douleur nociceptive, la plus connue, qui met en jeu les récepteurs périphériques de la douleur (un exemple simple : mettre sa main sur une source de chaleur déclenche une vive douleur qui permet de la retirer immédiatement) ; et la douleur neurogène ou neuropathique, par atteinte directe d’un nerf (c’est comme cela que l’on explique la fameuse « douleur des membres fantômes », assez fréquente chez les amputés). Les antalgiques sont efficaces dans le premier type, inefficaces dans le second.
Douleur aiguë et douleur chronique
On peut aussi différentier deux types de douleurs en fonction de leur évolution : la douleur aiguë, parfois très violente (infarctus du myocarde, péritonite…), et la douleur chronique, sourde et insidieuse, mais beaucoup plus difficile à vivre du fait qu’elle dure longtemps, comme certaines algies que l’on peut observer dans le zona, après disparition de l’éruption. De ce point de vue, les pires douleurs sont probablement celles qui accompagnent la phase terminale de certains cancers.
Antalgiques, calmants et antidouleurs
Les médicaments utilisés pour soulager la douleur sont appelés indifféremment antalgiques, calmants, et aussi antidouleurs, ce dernier mot étant plus employé par les patients que par le corps médical. Cependant, comme nous venons de le voir, certaines douleurs ne répondent pas aux antalgiques classiques, mais nécessitent le recours à des médicaments spécifiques, qui sont en général employés prioritairement dans d’autres indications que le traitement de la douleur.
Les antalgiques classiques sont classés, en fonction de leur efficacité, en trois paliers ou niveaux : les douleurs banales sont en général soulagées par les antalgiques de niveau 1 (le plus utilisé étant le paracétamol), alors que les douleurs les plus rebelles nécessiteront de recourir aux antalgiques de palier 3, représentés par la morphine et les morphiniques.
Evaluation de la douleur
Pour savoir quels antalgiques utiliser, il est nécessaire d’évaluer l’intensité de la douleur, grâce à des échelles d’évaluation, dont il existe plusieurs types, adaptés à chaque situation (les échelles utilisées chez l’enfant, par exemple, ne sont pas les mêmes que chez l’adulte).
Douleur et dolorisme
Le dolorisme est une conception du rôle de la douleur, très largement diffusée notamment par les différentes religions, selon laquelle non seulement la douleur, mais aussi la maladie en général, auraient une valeur morale. Selon les nombreux tenants du dolorisme, la douleur et la maladie seraient des « maîtres de vie ».
Cette attitude doloriste est vigoureusement combattue par le philosophe Ruwen Ogien, qui vient de publier (en 2017) un livre passionnant dans lequel il raconte son expérience douloureuse du cancer : Mes mille et une nuits, sous-titré La maladie comme drame et comme comédie. Pour schématiser à l’extrême sa pensée revigorante, ni la douleur ni la maladie n’ont de véritable sens, et ne nous aident aucunement à devenir meilleurs.
Article publié le 9 octobre 2017